Journal officiel n° L 382 du 31/12/1986 p. 0017 - 0021
édition spéciale finnoise: chapitre 6 tome 2 p. 0150
édition spéciale suédoise: chapitre 6 tome 2 p. 0150
 
DIRECTIVE DU CONSEIL du 18 décembre 1986 relative à la  coordination des droits des États membres concernant les agents  commerciaux indépendants (86/653/CEE)
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 57 paragraphe 2 et son article 100,
vu la proposition de la Commission (1),
(1) JO no C 13 du 18. 1. 1977, p. 2 et JO no C 56 du 2. 3. 1979, p. 5.
vu l'avis de l'Assemblée (2),
(2) JO no C 239 du 9. 10. 1978, p. 17.
vu l'avis du Comité économique et social (3),
(3) JO no C 59 du 8. 3. 1978, p. 31.
considérant  que les restrictions à la liberté d'établissement et à la libre  prestation des services pour les activités d'intermédiaires du commerce,  de l'industrie et de l'artisanat ont été supprimées par la directive  64/224/CEE (4);
(4) JO no 56 du 4. 4. 1964, p. 869/64.
considérant  que les différences entre les législations nationales en matière de  représentation commerciale affectent sensiblement, à l'intérieur de la  Communauté, les conditions de concurrence et l'exercice de la profession  et portent atteinte au niveau de protection des agents commerciaux dans  leurs relations avec leurs commettants, ainsi qu'à la sécurité des  opérations commerciales; que, par ailleurs, ces différences sont de  nature à gêner sensiblement l'établissement et le fonctionnement des  contrats de représentation commerciale entre un commettant et un agent  commercial établis dans des États membres différents;
considérant  que les échanges de marchandises entre États membres doivent  s'effectuer dans des conditions analogues à celles d'un marché unique,  ce qui imposte le rapprochement des systèmes juridiques des États  membres dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement de ce marché  commun; que, à cet égard, les règles de conflit de lois, même unifiées,  n'éliminent pas, dans le domaine de la représentation commerciale, les  inconvénients relevés ci-dessus et ne dispensent dès lors pas de  l'harmonisation proposée;
considérant, à cet égard, que les  rapports juridiques entre l'agent commercial et le commettant doivent  être pris en considération par priorité;
considérant qu'il y  a lieu de s'inspirer des principes de l'article 17 du traité en  procédant à une harmonisation dans le progrès de la législation des  États membres concernant les agents commerciaux;
considérant  que des délais transitoires supplémentaires doivent être accordés à  certains États membres soumis à des efforts particuliers pour adapter  leurs réglementations aux exigences de la présente directive, concernant  notamment l'indemnité après la cessation du contrat entre le commettant  et l'agent commercial,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
CHAPITRE PREMIER
Champ d'application
Article premier
1.  Les mesures d'harmonisation prescrites par la présente directive  s'appliquent aux dispositions législatives, réglementaires et  administratives des États membres qui régissent les relations entre les  agents commerciaux et leurs commettants.
2. Aux fins de la  présente directive, l'agent commercial est celui qui, en tant  qu'intermédiaire indépendant, est chargé de façon permanente, soit de  négocier la vente ou l'achat de marchandises pour une autre personne,  ci-après dénommée «commettant», soit de négocier et de conclure ces  opérations au nom et pour le compte du commettant.
3. Un agent commercial aux fins de la présente directive ne peut être notamment:
 - une personne qui, en qualité d'organe, a le pouvoir d'engager une société ou association,
 - un associé qui est légalement habilité à engager les autres associés,
 - un administrateur judiciaire, un liquidateur ou un syndic de faillite.
Article 2
1. La présente directive ne s'applique pas:
 - aux agents commerciaux dont l'activité n'est pas rémunérée,
 - aux agents commerciaux dans la mesure où ils opèrent dans les bourses de commerce ou sur les marchés de matières premières,
  - à l'organisme connu sous l'appellation de «Crown Agents for Overseas  Governments and Administrations», tel qu'il a été institué au  Royaume-Uni en vertu de la loi de 1979 relative aux «Crown Agents», ou à  ses filiales.
2. Chacun des États membres a la faculté de prévoir  que la directive ne s'applique pas aux personnes qui exercent les  activités d'agent commercial considérées comme accessoires selon la loi  de cet État membre.
CHAPITRE II
Droits et obligations
Article 3
1.  L'agent commercial doit, dans l'exercice de ses activités, veiller aux  intérêts du commettant et agir loyalement et de bonne foi.
2. En particulier, l'agent commercial doit:
a) s'employer comme il se doit à la négociation et, le cas échéant, à la conclusion des opérations dont il est chargé;
b) communiquer au commettant toute information nécessaire dont il dispose;
c) se conformer aux instructions raisonnables données par le commettant.
Article 4
1. Dans ses rapports avec l'agent commercial, le commettant doit agir loyalement et de bonne foi.
2. En particulier, le commettant doit:
a) mettre à la disposition de l'agent commercial la documentation nécessaire qui a trait aux marchandises concernées;
b)  procurer à l'agent commercial les informations nécessaires à  l'exécution du contrat d'agence, notamment aviser l'agent commercial  dans un délai raisonnable dès qu'il prévoit que le volume des opérations  commerciales sera sensiblement inférieur à celui auquel l'agent  commercial aurait pu normalement s'attendre.
3. Le commettant  doit, par ailleurs, informer l'agent commercial, dans un délai  raisonnable, de son acceptation, de son refus ou de l'inexécution d'une  opération commerciale qu'il lui a apportée.
Article 5
Les parties ne peuvent pas déroger aux dispositions des articles 3 et 4.
CHAPITRE III
Rémunération
Article 6
1.  En l'absence d'accord à ce sujet entre les parties et sans préjudice de  l'application des dispositions obligatoires des États membres sur le  niveau des rémunérations, l'agent commercial a droit à une rémunération  conforme aux usages pratiqués là où il exerce son activité et pour la  représentation des marchandises faisant l'objet du contrat d'agence. En  l'absence de tels usages, l'agent commercial a droit à une rémunération  raisonnable qui tient compte de tous les éléments qui ont trait à  l'opération.
2. Tout élément de la rémunération variant avec le  nombre ou la valeur des affaires sera considéré comme constituant une  commission aux fins de la présente directive.
3. Les articles 7 à  12 ne s'appliquent pas dans la mesure ou l'agent commercial n'est pas  rémunéré en tout ou en partie à la commission.
Article 7
1. Pour une opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission:
a) lorsque l'opération a été conclue grâce à son intervention
ou
b)  lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu  antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre.
2. Pour une opération conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a également droit à la commission:
 - soit lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminées,
  - soit lorsqu'il jouit d'un droit d'exclusivité pour un secteur  géographique ou un groupe de personnes déterminées, et que l'opération a  été conclue avec un client appartenant à ce secteur ou à ce groupe.
Les États membres doivent insérer dans leur loi l'une ou l'autre possibilité visée aux deux tirets ci-dessus.
Article 8
Pour une opération commerciale conclue après la cessation du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission:
a)  si l'opération est principalement due à l'activité qu'il a déployée au  cours du contrat d'agence et si l'opération est conclue dans un délai  raisonnable à compter de la cessation de ce contrat
ou
b)  si, conformément aux conditions visées à l'article 7, la commande du  tiers a été reçue par le commettant ou par l'agent commercial avant la  cessation du contrat d'agence.
Article 9
L'agent  commercial n'a pas droit à la commission visée à l'article 7 si  celle-ci est due, en vertu de l'article 8, à l'agent commercial  précédent, à moins qu'il ne résulte des circonstances qu'il est  équitable de partager la commission entre les agents commerciaux.
Article 10
1. La commission est acquise dès que et dans la mesure où l'une des circonstances suivantes se présente:
a) le commettant a exécuté l'opération;
b) le commettant devrait avoir exécuté l'opération en vertu de l'accord conclu avec le tiers;
c) le tiers a exécuté l'opération.
2.  La commission est acquise au plus tard lorsque le tiers a exécuté sa  part de l'opération ou devrait l'avoir exécutée si le commettant avait  exécuté sa part de l'opération.
3. La commission est payée au plus tard le dernier jour du mois qui suit le trimestre au cours duquel elle était acquise.
4. Il ne peut être dérogé par accord aux dispositions des paragraphes 2 et 3 au détriment de l'agent commercial.
Article 11
1. Le droit à la commission ne peut s'éteindre que si et dans la mesure où:
 - il est établi que le contrat entre le tiers et le commettant ne sera pas exécuté
et
- l'inexécution n'est pas due à des circonstances imputables au commettant.
2. Les commissions que l'agent commercial a déjà perçues sont remboursées si le droit y afférent est éteint.
3. Il ne peut être dérogé par accord à la disposition du paragraphe 1 au détriment de l'agent commercial.
Article 12
1.  Le commettant remet à l'agent commercial un relevé des commissions  dues, au plus tard le dernier jour du mois suivant le trimestre au cours  duquell elles sont acquises. Ce relevé mentionne tous les éléments  essentiels sur la base desquels le montant des commissions a été  calculé.
2. L'agent commercial a le droit d'exiger que lui soient  fournies toutes les informations, en particulier un extrait des livres  comptables, qui sont à la disposition du commettant et qui lui sont  nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues.
3. Il ne peut être dérogé par accord aux dispositions des paragraphes 1 et 2 au détriment de l'agent commercial.
4.  Cette directive n'interfère pas avec les dispositions internes des  États membres qui reconnaissent à l'agent commercial un droit de regard  sur les livres comptables du commettant.
CHAPITRE IV
Conclusion et fin du contrat d'agence
Article 13
1.  Chaque partie a le droit, sur demande, d'obtenir de l'autre partie un  écrit signé mentionnant le contenu du contrat d'agence y compris celui  des avenants ultérieurs. Il ne peut être renoncé à ce droit.
2.  Nonobstant le paragraphe 1, un État membre peut prescrire qu'un contrat  d'agence n'est valable que s'il est constaté par écrit.
Article 14
Un  contrat à durée déterminée qui continue à être exécuté par les deux  parties après son terme est réputé transformé en un contrat d'agence à  durée indéterminée.
Article 15
1. Lorsque le contrat d'agence est conclu pour une durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant préavis.
2.  La durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de  deux mois pour la deuxième année commencée, de trois mois pour la  troisième année commencée et les années suivantes. Les parties ne  peuvent convenir de délais de préavis plus courts.
3. Les États  membres peuvent fixer la durée de préavis à quatre mois pour la  quatrième année du contrat, à cinq mois pour la cinquième année et à six  mois pour la sixième année et les années suivantes. Ils peuvent décider  que les parties ne peuvent convenir de délais de préavis plus courts.
4.  Si les parties conviennent de délais plus longs que ceux qui sont  prévus par les paragraphes 2 et 3, le délai de préavis à respecter par  le commettant ne doit pas être plus court que celui que devra observer  l'agent commercial.
5. Pour autant que les parties n'en aient pas  disposé autrement, la fin du délai de préavis doit coïncider avec la fin  d'un mois civil.
6. Le présent article s'applique au contrat de  durée déterminée transformé, en vertu de l'article 14, en un contrat de  durée indéterminée, étant entendu que, dans le calcul de la durée du  préavis, doit intervenir la durée déterminée qui précède.
Article 16
La  présente directive ne peut interférer avec l'application du droit des  États membres lorsque celui-ci prévoit la fin du contrat sans délai:
a) en raison d'un manquement d'une des parties à exécuter tout ou partie de ses obligations;
b) lorsque surviennent de circonstances exceptionnelles.
Article 17
1.  Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer à  l'agent commercial, après cessation du contrat, une indemnité selon le  paragraphe 2 ou la réparation du préjudice selon le paragraphe 3.
2. a) L'agent commercial a droit à une indemnité si et dans la mesure où:
  - il a apporté de nouveaux clients au commettant ou développé  sensiblement les opérations avec les clients existants et le commettant a  encore des avantages substantiels résultant des opérations avec ces  clients
et
- le paiement de cette indemnité est équitable,  compte tenu de toutes les circonstances, notamment des commissions que  l'agent commercial perd et qui résultent des opérations avec ces  clients. Les États membres peuvent prévoir que ces circonstances  comprennent aussi l'application ou non d'une clause de non-concurrence  au sens de l'article 20.
b) Le montant de l'indemnité ne peut  excéder un chiffre équivalent à une indemnité annuelle calculée à partir  de la moyenne annuelle des rémunérations touchées par l'agent  commercial ou cours de cinq dernières années et, si le contrat remonte à  moins de cinq ans, l'indemnité est calculée sur la moyenne de la  période.
c) L'octroi de cette indemnité ne prive pas l'agent commercial de faire valoir des dommages-intérêts.
3. L'agent commercial a droit à la réparation du préjudice que lui cause la cessation de ses relations avec le commettant.
Ce préjudice découle notamment de l'intervention de la cessation dans des conditions:
  - qui privent l'agent commercial des commissions dont l'exécution  normale du contrat lui aurait permis de bénéficier tout en procurant au  commettant des avantages substantiels liés à l'activité de l'agent  commercial,
 - et/ou qui n'ont pas permis à l'agent commercial  d'amortir les frais et dépenses qu'il a engagés pour l'exécution du  contrat sur la recommandation du commettant.
4. Le droit à  l'indemnité visé au paragraphe 2 ou la réparation du préjudice visée au  paragraphe 3 naît également lorsque la cessation du contrat intervient à  la suite du décès de l'agent commercial.
5. L'agent commercial  perd le droit à l'indemnité dans les cas visés au paragraphe 2 ou à la  réparation du préjudice dans le cas visés au paragraphe 3 s'il n'a pas  notifié au commettant, dans un délai d'un an à compter de la cessation  du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits.
6. La Commission  soumet au Conseil, dans un délai de huit ans à compter de la  notification de la présente directive, un rapport consacré à la mise en  oeuvre du présent article et lui soumet, le cas échéant, des  propositions de modifications.
Article 18
L'indemnité ou la réparation visée à l'article 17 n'est pas due:
a)  lorsque le commettant a mis fin au contrat pour un manquement imputable  à l'agent commercial et qui justifierait, en vertu de la législation  nationale, une cessation du contrat sans délai;
b) lorsque l'agent  commercial a mis fin au contrat, à moins que cette cessation ne soit  justifiée par des circonstances attribuables au commettant ou par l'âge,  l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial en raison desquels la  poursuite de ses activités ne peut raisonnablement plus être exigée de  lui;
c)lorsque, selon un accord avec le commettant, l'agent  commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en  vertu du contrat d'agence.
Article 19
Les  parties ne peuvent pas, avant l'échéance du contrat, déroger aux  dispositions des articles 17 et 18 au détriment de l'agent commercial.
Article 20
1.  Aux fins de la présente directive, une convention qui prévoit une  restriction des activités professionnelles de l'agent commercial après  la cessation du contrat est dénommée clause de non-concurrence.
2. Une clause de non-concurrence n'est valable que si et dans la mesure où:
a) elle a été établie par écrit
et
b)  elle vise le secteur géographique ou le groupe de personnes et le  secteur géographique confiés à l'agent commercial ainsi que le type de  marchandises dont il avait la représentation aux termes du contrat.
3. La clause de non-concurrence n'est valable que pour une période maximale de deux ans après la cessation du contrat.
4.  Le présent article n'affecte pas les dispositions de droit national qui  apportent d'autres restrictions à la validité ou à l'applicabilité des  clauses de non-concurrence ou qui prévoient que les tribunaux peuvent  diminuer les obligations des parties découlant d'un tel accord.
CHAPITRE V
Dispositions générales et finales
Article 21
Aucune  disposition de la présente directive ne peut obliger un État membre à  prévoir la divulgation de données au cas où cette divulgation serait  contraire à l'ordre public.
Article 22
1. Les  États membres mettent en vigueur les dispositions nécessaires pour se  conformer à la présente directive avant le 1er janvier 1990. Ils  informent immédiatement la Commission. Lesdites dispositions  s'appliquent au moins aux contrats conclus après leur mise en vigueur.  Elles s'appliquent aux contrats en cours le 1er janvier 1994 au plus  tard.
2. À compter de la notification de la présente directive,  les États membres communiquent à la Commission le texte des dispositions  essentielles d'ordre législatif, réglementaire ou administratif qu'ils  adoptent dans le domaine régi par la présente directive.
3.  Toutefois, en ce qui concerne l'Irlande et le Royaume-Uni, la date du  1er janvier 1990 visée au paragraphe 1 est remplacée par celle du 1er  janvier 1994.
En ce qui concerne l'Italie, cette date est  remplacée par le 1er janvier 1993 pour ce qui concerne les obligations  découlant de l'article 17.
Article 23
Les États membres sont destinataires de la présente directive.
Fait à Bruxelles, le 18 décembre 1986.
Par le Conseil
Le président
M. JOPLING